CERNIER -
«Posez bien vos pieds, balancez la boule et lancez-la avec du punch», nous explique Daniel Pellaton, de Cernier, membre de l'Association intercantonale des joueurs de boules. Celle-ci a installé cet été à Evologia, à Cernier, un jeu de quilles neuchâtelois entièrement en bois pour promouvoir ce sport traditionnel en voie de disparition.
Ce «Grand jeu neuchâtelois» comporte neuf quilles. Il s'agit bien sûr d'en faire tomber le maximum possible au moyen de boules pesant de six à neuf kilos. Mais un coup ne compte que si la quille la plus proche du joueur est renversée.
Autre particularité: la piste. Ce pont d'une quinzaine de mètres de long est composé de deux planches (surtout en chêne ou en mélèze) jointes en forme de circonflexe.
«Pour que les boules glissent bien, à l'extérieur, on arrosait ces ponts de bois avec de l'eau», raconte Daniel Pellaton. «A l'intérieur, on les cire comme du parquet.»
Ce jeu était très répandu de la fin du 19e siècle à la première moitié du 20e dans toute la région neuchâteloise. «ll n'existait pas une métairie ou un restaurant de montagne qui n'avait pas sa piste en bois», poursuit notre moniteur d'un jour.
Aujourd'hui, il n'en reste que trois, dans des restaurants de La Chaux-de-Fonds. L'attrait populaire s'est progressivement flétri avec l'arrivée, dans les années 1960, de pistes en «asphalte» où les quilles, retenues par des cordons, sont remises en place automatiquement. Mais pourquoi alors continuer de jouer à la mode d'antan plutôt que dans des bowlings modernes?
«Avec le jeu neuchâtelois en bois, on se sent plus proche de la nature», répond Daniel Pellaton. «C'est aussi très convivial puisqu'il nous faut du monde pour la remise en place manuelle des quilles, qu'on appelle le requillage.»
Cette tâche est souvent confiée à des jeunes qui gagnent ainsi un peu d'argent de poche. Une manne méritée, car il est fatiguant de passer plusieurs heures à «requiller» et à renvoyer les boules sur une petite rampe en direction des joueurs.
Malgré tout, les amateurs ont de la peine à rajeunir les effectifs des quatre clubs qui survivent dans le canton: deux à La Chaux-de-Fonds, un au Locle et celui de La Vue-des-Alpes. Les sociétés du Val-de-Ruz et de Neuchâtel ont disparu voici une quarantaine d'années.
«J'imagine que pour la jeunesse actuelle, le jeu de quilles neuchâtelois est trop lent. En ce qui me concerne, j'apprécie précisément ces moments vécus à un rythme moins rapide que le quotidien», avoue Daniel Pellaton, actif dans l'informatique. «Nous avons de la chance d'avoir pu monter une piste dans l'ancienne vacherie d'Evologia. Ça correspond bien à l'ambiance du site et à celle de Fête la terre.»
Et les principales qualités d'un bon quilleur? «La régularité avec laquelle il pose sa boule sur la piste. Il s'agit d'avoir une bonne vision de cette piste, de comprendre ses réactions. La position des pieds est aussi très importante, à un ou deux centimètres près.»
Super facile à comprendre en théorie. En pratique, il nous a fallu six essais, et du bol, pour réussir un coup à trois points.
Démonstrations gratuites à Evologia-Cernier.
Groupes sur réservation (079 675 72 71).
En permanence le week-end de Fête la terre www.quilles.ch
ALEXANDRE BARDET